Institut Médico-Éducatif La Cigale

2019 — 2020 | 300 h | Cigalières – APEMH, Nîmes
Afin de clore mon cycle universitaire, me permettant d’accéder au titre de « psychologue clinicienne » tant attendu, j’ai choisi de découvrir la population infanto-juvénile au sein d’un grand groupe institutionnel : l’Institut Médico-Éducatif. L’année universitaire 2019/2020 a été habitée par de nombreuses découvertes, elle a été le lieu d’un passage d’un état à un autre, du statut de « stagiaire » à celui de « psychologue ».

enfants et adolescents porteurs de handicap, avec ou sans troubles associés, et de m’adapter singulièrement à leurs particularités propres. Par conséquent, j’ai eu l’occasion de rencontrer des enfants porteurs de troubles autistiques et/ou psychotiques, ainsi que des enfants aux troubles du comportement et/ou porteurs d’une déficience intellectuelle, dans le cadre de prises en charge individuelle et/ou groupales. Notons que leur principale particularité relève d’abord d’un handicap principalement moteur, s’accompagnant ou non de difficultés diverses (auditives, langagières, cognitives, etc.).

introduction Institut-Médico Éducatif La Cigale

Source : Freepik

À l’occasion de ce stage long, j’ai eu diverses occasions d’aller à la rencontre de ces jeunes et de leur famille :

  • J’ai rencontré cinq jeunes enfants et adolescents dans le cadre d’une prise en charge clinique individuelle. Une autre prise en charge a été partagée avec ma garante de stage.

Les objectifs pouvaient être multiples, tout comme les outils employés. Il était à la fois possible d’en passer par le jeu, le visionnage de vidéo, la lecture de conte ou l’usage de la pâte à modeler. Aussi, accompagner l’enfant dans ses propres explorations pouvait être porteur.

  • J’ai adopté la posture d’observatrice-écrivante pour deux ateliers thérapeutiques (l’un portant sur le conte-théâtre et le second sur la musicothérapie groupale).

Aussi, au-delà de la rencontre avec les enfants et leur famille, une découverte majeure s’est offerte à moi. Bien que je m’étais déjà prêtée aux médiations thérapeutiques, en tant que participante ou co-thérapeute, je n’avais pas encore eu l’occasion d’exercer la position d’extériorité, d’observatrice-écrivante et d’encadrement. Au cours de ce stage, j’ai particulièrement été habitée par cette posture nouvelle de régulation et de supervision, cet exercice de « bordure » qui m’a demandé finesse et délicatesse. Je devenais alors le « clignotant », le « tuteur » et le « superviseur » des thérapeutes qui coanimaient ces ateliers. Je pouvais ainsi prévenir des dérives éventuelles et favoriser la mise-à-jour des mouvements transféro-contre-transférentiels, en après-coup.

  • J’ai initié la passation, la cotation et l’analyse clinique d’un bilan psychologique complet d’un jeune adolescent en particulier.

Dans le cadre de ce bilan complet, j’ai proposé au jeune adolescent la passation d’un WISC-V, des épreuves graphiques (dessin du bonhomme, dessin de la famille, dessin de la Dame de Fay) et projectives (Rorschach, TAT). En totale autonomie, je me suis assurée du consentement éclairé du jeune homme ainsi que de ses parents, avant de procéder à la passation, la cotation, l’analyse clinique et enfin à la rédaction du compte-rendu à destination des professionnels et de la famille.

  • En cours d’année, ma tutrice de stage m’a transmise l’animation d’une rencontre groupale, l’« accueil à thème », proposée chaque semaine.
  • De façon hebdomadaire, j’ai coanimé le « groupe fille » ouvert aux adolescents de l’IME, des questions relatives à la vie sexuelle et affective pouvait y être soulevées.
  • Quotidiennement, j’ai participé à la « vie » sur les groupes en allant à la rencontre des enfants et des professionnels.
  • J’ai pris part aux festivités organisées avec les enfants, parents et professionnels au sein de l’institution, favorisant des espaces interstitiels et informel riches.
  • J’ai participé à divers temps de réunion : une réunion « à thème », un temps de régulation en équipe et enfin un temps consacré à la mise-à-jour du projet personnalisé de chaque enfant, suivi de la rencontre avec la famille.
  • Les nombreuses rencontres avec les parents m’ont questionnées et mises au travail. Ainsi, j’ai proposé un projet qui n’avait pas encore été envisagé par l’institution.

Il s’agissait de mettre en place un groupe d’échange, de partage et de discussion, offert aux parents et aux beaux-parents d’enfants accueillis en IME. Cette initiative que j’ai beaucoup investie a été également bien accueillie par l’institution qui m’a reçue pour ce stage.

 

  • Au SESSAD, j’ai pris part au groupe de parole à visée thérapeutique proposés aux jeunes enfants et adolescents de la structure. Puis, j’ai participé activement au « groupe théâtre » dans un objectif de création, d’expression et de représentation.
conclusion Institut-Médico Éducatif La Cigale

Réalisé en grande autonomie, ce stage m’aura pareillement permis de prendre de l’assurance et de l’indépendance dans ma pratique, quand je devais faire appel à ma propre créativité et spontanéité, tout en assumant mes choix cliniques.

Dans une découverte permanente du métier de clinicien, dont j’aime l’appellation proposée par Pontalis : d’un « métier à tisser et à détisser » (PONTALIS, 1995), je ne cesse d’être bousculée dans mes retranchements et mes apprentissages. Je me rends compte qu’il s’agit d’une pratique à (ré)inventer et à actualiser constamment. Il n’est jamais question de se satisfaire de ce que l’on nous propose. Cette place qui nous est offerte n’est pas acquise, nous devons nous en saisir, nous l’approprier et l’éprouver, tant au niveau clinique qu’institutionnel, auprès de la population rencontrée et des professionnels avec qui nous devons apprendre à exercer, en équipe.

« Le handicap choque. Surtout celui, insupportable, scandaleux, du petit enfant.
Mais surtout le handicap fait peur. Il nous confronte aux limites de l’humain, car il suscite des images d’anormalité proches de la bestialité ou de la monstruosité. L’enfant handicapé bouscule l’image idéale de l’enfance, que nous nous plaisons à imaginer. Enfance heureuse. Enfant parfait, qui est à la fois l’enfant que nous avons été et l’enfant que nous avons mis au monde ou que nous pourrions engendrer. C’est en cela que l’enfant handicapé fait peur, car son étrangeté révèle, comme dans un miroir brisé, notre propre étrangeté, que nous voulons ignorer. […]

Il ne s’agit pas de réparer l’irréparable. Écouter la plainte de l’enfant privé de sa motricité n’est pas la lui rendre. Ce sont des questions qui appellent d’autres questions. Dès lors, l’objectif n’est pas d’apporter des réponses, mais d’amener les questions à se formuler. »

(KORFF-SAUSSE Simone, 2014)

« La réalité irréelle et impensable dans laquelle séjournent, sans y séjourner, l’enfant dans l’autisme profond. L’enfant et son corps ne sont pas ailleurs. Ce corps sans moi ne peut être pensé et décrit que dans le négatif, comme résultat d’une soustraction comme absence sans retour, comme vide sensoriel et mental, où tout semble avoir précipiter dans le néant, sans laisser de trace. Ce corps se déplace dans l’espace au hasard, tourne en rond sans tourner en rond, sans projet, sans provenance et sans but, sans reconnaitre de bornes et de limites, se protégeant ainsi de toute expérience d’existence, de linéarité et d’altérité, d’entrée et de sortie. Les corps de ces enfants se dérobent, se liquéfient, se volatilisent ou se collent en unité adhésive bidimensionnelle à l’objet, afin d’éviter le danger mortel de la perception de l’existence d’une différence. »

(MAÏELLO Suzanne, 2018)